Focus sur le 48H film Project France

Focus sur le 48H film Project France

Deux membres d’Objectif Censier se sont rendus au cinéma Le Grand Action le weekend du 17 novembre afin de découvrir les courts métrages présentés au 48H film Project de Paris. 11 séances de visionnage ont été programmées sur tout le week-end, avec la possibilité pour le public de voter pour leurs trois films préférés. Petit rappel du concept : le 48H est une compétition de courts métrages qui impose aux réalisateurs d’écrire, tourner et monter leurs films en 48 heures et pas une minute de plus ! Le projet a vu le jour en 2001 à Washington.  C’est un événement qui a lieu dans pas moins de 130 villes dans le monde avec plusieurs étapes de sélection, jusqu’à atteindre le graal : la finale internationale nommée Filmapalooza. C’est un festival qui réunit chaque année plus de 4 000 équipes de tournages et qui sert de véritable tremplin aux équipes qui réussissent à remporter des prix. Tous les films sont projetés et jugés par des professionnels du cinéma. Tout le monde peut participer, débutants comme équipes de films bien rodées ! 

Au-delà d’avoir pu assister à certaines séances, nous avons eu l’occasion de rencontrer monsieur Olivier Dussausse, producteur du 48H France. Voici un extrait de notre entretien : 

Océane Boyadjian : Pouvez-vous nous expliquer les différentes étapes du 48H et ce qu’il se passe aujourd’hui ?

Olivier Dussausse : Le 48H se joue en plusieurs étapes. Il y a d’abord le week-end de compétition qui a eu lieu du 20 au 22 octobre : en bref, le vendredi 20 au soir on a fait un tirage au sort du genre de films que devaient réaliser les équipes, ça se déroule à la mairie du 15e arrondissement. Cette année on a compté 140 équipes participantes qui tirent au sort deux genres de films et elles choisissent entre les deux. Parmi ces deux combinaisons par exemple il y avait films d’arts martiaux ou films muets, on a une trentaine de combinaisons possibles. Pour être sûrs que les équipes ne trichent pas, on impose en plus 3 éléments : une ligne de dialogue, un personnage et un objet qui doivent obligatoirement apparaître dans le film. A partir de là, elles ont 48 heures montre en main pour écrire, tourner et monter le film. On les retrouve le dimanche soir à la mairie et on fait le décompte final. On est très à cheval sur l’horaire, les films doivent être rendus en 48 heures, pas une minute de plus ! Les films rendus en retard sont projetés en hors compétition. On vérifie tout avant de projeter les films, un problème dans le nom du personnage imposé, un mot oublié dans la phrase de dialogue et c’est l’élimination ! On vérifie aussi la durée, c’est à dire qu’un film doit faire entre 4 et 7 minutes, 4 minutes minimum 7 minutes maximum. Les équipes ont le droit à une minute de générique en plus.  Ce weekend, on projette tous les films au Grand Action, vous venez d’assister à la 3ème séance, il y en a 11 en tout. La finale de Paris aura lieu le 9 décembre, le jury va pouvoir délibérer sur les films pré-sélectionnés et il y a aussi des prix du public. On fait aussi un événement en janvier pour montrer les meilleurs films français. Ce que j’aime beaucoup avec la finale parisienne et la finale nationale, c’est qu’on oublie que les films ont été faits en 48 heures, ils sont d’une qualité rare ! 

Romain Dubourg-Ramy : Comment se déroulent les projections ?

OD : On fait très attention aux projections car on tient à avoir la meilleure qualité de projection possible. On fait des DCP, on travaille avec le cinéma Grand Action et on opère une conformité au niveau du son ; il y a vraiment tout un boulot pour que ça fonctionne. L’idée c’est « j’ai fait mon film en 48 heures et je vais le voir au cinéma » et ça c’est la première récompense pour les participants, c’est d’arriver dans une chouette salle comme ça, ils sont bien installés, bien posés et entourés des amis et de la famille pour présenter leurs productions. C’est un événement très sympa, il y a une bonne ambiance, vous verrez en sortant ils restent dehors à discuter pendant trois heures de leurs films ! 

OB : Les participants du 48H viennent exclusivement de Paris ? 

OD : Il faut savoir que le 48H c’est une compétition internationale qui se déroule dans 130 villes du monde entier. Moi, je suis producteur pour la France, il y a treize villes en France qui organisent le 48H cette année, on vient même d’ouvrir la Guadeloupe ! Pour vous en citer quelques-uns, on a La Réunion, Paris, Lyon, Marseille, Toulouse, Nantes, Tours, Rennes et j’en oublie… On a aussi une édition online. On a une espèce de maillage sur toute la France parce que l’idée c’était de donner aussi la possibilité pour n’importe qui en France de pouvoir faire des 48H.  Pour ce qui est de Paris, chaque année on a aux alentours de 150 équipes qui participent. On attire du monde car il y a plein de gens qui se disent « faut qu’on fasse un 48H c’est une manière de se prouver ce qu’on sait faire… » Ce n’est pas compliqué, maintenant pour se détacher du lot il y a deux trucs : le 48H et le Nikon. Par exemple Alexandre Dino (qui travaille au Nikon) est jury du 48H cette année. On se connaît, c’est le milieu du cinéma quoi, moi-même je fais partie du comité de présélection du Nikon.  

OB : Justement, Objectif Censier a eu comme jury de la 15ème édition Albert Piltzer qui fait également partie du comité de présélection du Nikon. Nos étudiants sont au fait du Nikon, mais peuvent-ils se lancer dans l’aventure 48H ? 

OD : Pour les étudiants on a le Grand Prix des écoles. On réserve aux 48 premières équipes inscrites sous l’égide d’une école, d’une université, quelle que soit l’école, ce n’est pas nécessairement école de cinéma, de s’inscrire pour la somme de 50€ au lieu des 100€ de frais d’inscription. On fait un Grand Prix des écoles nationales, car on sait qu’en école on n’a pas forcément l’expérience de grosses équipes qui bossent ensemble depuis longtemps et le but c’est de pouvoir mettre en lumière ces équipes étudiantes au début de leur carrière. Par exemple, ceux qui ont gagné le prix l’année dernière sont revenus cette année, ils ne sont plus à l’école et on sent un vrai step up, on est quasi sûrs qu’ils vont être sélectionnés pour la finale et c’est ça qui fait plaisir. Dans la même idée, il y a une équipe qui s’appelle « Avec le sourire » que j’ai vu démarrer au 48H, au début c’était bourré d’erreurs et puis 5/6 ans plus tard, ils sont sélectionnés pour la finale internationale à Filmapalooza, ils arrivent deuxième, gagnent le prix du meilleur acteur… Le 48H c’est une école à part entière : en deux jours on prend deux ans d’expérience. Tu arrives le vendredi soir, tu as deux jours pour faire un film, pas le temps de discuter, de tergiverser, il faut avancer. C’est de l’anti-procrastination. On appelle ça faire un film en 48 heures mais c’est faire une prod en 48 heures parce qu’il n’y a pas que le tournage, il faut aller chercher des solutions techniques, il y a l’avant et l’après. Aujourd’hui, faire un 48H et avoir eu des prix ça pèse sur le CV, ça montre que tu es vif d’esprit. 

RDR : Les films réalisés les éditions précédentes, on peut les retrouver quelque part ? 

OD : Oui, bien sûr ! Vous les retrouvez tous sur notre chaîne YouTube. 

OB : Vous pouvez nous en dire plus sur cette finale ?

OD : Le meilleur film de chaque ville est sélectionné pour la finale internationale qui s’appelle Filmapalooza, cette année elle aura lieu à Lisbonne, mais je l’ai déjà produit ici à Paris en 2018. 

On la retrouve beaucoup aux États-Unis par exemple, l’année dernière c’était à Los Angeles et il y a deux ans à Washington. En général, les films français cartonnent, on est le pays qui a gagné le plus de fois, on ressent vraiment cette école française. Sur 15/16 éditions, la France a gagné six fois ! Les deux meilleurs pays sont la France et les Pays-Bas. 

OB : J’imagine que ce sont de toutes petites équipes pour s’organiser en si peu de temps ? 

OD : Il y a de tout. Par exemple, le film Jusqu’à l’aube, quand tu regardes le générique, tu vois qu’ils ont fait le film à 5. Pourtant c’est un film hyper propre. C’est un des deux acteurs qui a fait le montage pour vous dire ! Après, il y a aussi des très grosses équipes comme pour Un homme éloquent. Il y a vraiment de tout, des écoles, des clubs de retraités…  Ce qu’aiment bien les petites prod avec le 48H, c’est qu’il n’y a pas de clients pour leur donner des contraintes : ils racontent l’histoire qu’ils veulent, ils sont libres de dire ce qu’ils veulent etc. 

RDR : Pouvez-vous nous parler de l’inscription ? 

OD : Les participants vont sur notre site et doivent choisir la ville dans laquelle ils souhaitent participer. Ils nomment un chef d’équipe qui sera le référent de l’équipe et le contact privilégié de la compétition. Les équipes doivent alors payer les frais d’inscription réguliers qui s’élèvent à 100€. Cette somme couvre nos frais de production, l’équipe, les salles mais aussi les billets d’avion pour aller à Lisbonne et les cérémonies. Comme je vous l’ai dit précédemment pour les 48 premières équipes d’école, la somme est abaissée à 50€. 

OB : Et vous, depuis combien de temps êtes-vous lié au 48H ? 

OD : Je produis le 48H France depuis 2010. De mon côté, je suis un ancien participant, j’avais gagné en 2006 avec un western, c’était une comédie qui avait fait marrer les gens. J’avais été à la finale internationale au Mexique et on a eu le prix de la meilleure réalisation. Après cet événement on est resté en contact avec les personnes de la prod internationale qu’on a rencontré à la finale. Et quand ceux qui s’occupaient de Paris se sont arrêtés, ils m’ont contacté en me disant « ça te dirait de reprendre ? », j’ai dit oui mais j’ai mis une seule condition, celle d’étendre la compétition à toute la France. Je voulais donner la possibilité à des gens en province de faire des 48H et je ne regrette pas du tout parce qu’on a pu découvrir des talents vraiment un peu partout en province. Comme il y a aussi de plus en plus d’écoles en province, c’est un peu ce qu’on cherche quand on fait une école à la base et qu’on veut essayer des choses.  

De notre côté, nous avons fortement apprécié l’expérience de spectateurs du 48H : les équipes de films étaient présentes sur place, ce qui nous a permis de rencontrer les réalisateurs et de pouvoir échanger sur leurs expériences. Comme évoqué précédemment, le public participe aussi aux délibérations puisqu’il vote pour le prix du Public. Les séances durent approximativement 1h30 et présentent environ douze courts métrages. Le plus impressionnant lors du visionnage de certaines productions, c’est de se dire que le projet a vu le jour en 48 heures : le scénario, le casting, le décor, le tournage mais aussi le montage ! De plus, les éléments imposés par le festival ajoutent de la difficulté et axent les films vers des intrigues spécifiques.  

Si vous souhaitez assister à la finale du 48H de Paris, rendez-vous le samedi 9 décembre prochain au Grand Action ! 

Un article et un entretien menés par Océane Boyadjian et Romain Dubourg-Ramy

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