Sator
Vivant en solitaire dans sa cabane de chasse, Adam cherche à prouver l’existence d’une entité semblant liée à sa famille depuis des générations. Film d’épouvante indépendant dont la production se révèle particulièrement énigmatique, Sator a été créé (quasiment) de bout en bout par son réalisateur, Jordan Graham. Paru en 2019 aux États-Unis, notamment au Fantasia Film Festival de Montréal, le long-métrage nous est enfin parvenu en France depuis 2021, en streaming sur Shadowz.
Naturellement comparé à des œuvres considérées aujourd’hui comme des références en la matière, on pense évidemment à The Blair Witch Project (1999, Eduardo Sánchez & Daniel Myrick), The Witch: A New-England Folktale (2015, Robert Eggers) et Midsommar (2019, Ari Aster), Sator puise une partie de sa mythologie dans la folk horror, sous-genre du cinéma d’épouvante né en Europe et dont l’héritage continue de se distiller au sein du paysage horrifique américain sous des formes de plus en plus variées. En effet, la folk horror se traduit généralement par la menace de communautés enclavées aux croyances et rites ancestraux se soldant la plupart du temps par un sacrifice comme dans The Wicker Man (1973, Robin Hardy), pour continuer notre liste débutée plus haut, ou encore celle de légendes folkloriques tournant souvent autour de la sorcellerie comme dans Hereditary (2018, Ari Aster). L’influence de ces dernières œuvres est indéniable : on retrouve notamment des cadres soignés rappelant le travail de Pawel Pogorzelski, chef-opérateur collaborant avec Ari Aster, composante cruciale du genre en ce qui concerne la sublimation des paysages sauvages et des objets à la dimension occulte. Le design sonore n’est pas en reste, fonctionnant sur la quasi absence de musique et l’omniprésence de longues nappes de sons sourds, semblables à des vents violents, lointains et continus, sachant cependant laisser leur place aux bruitages et ambiances quand il le faut.
Fort de ces inspirations qui ont nourri Sator en cours de production, Jordan Graham parvient à bâtir un univers plutôt solide et suffisamment mystérieux pour laisser aux spectateur·ice·s leur part d’interprétation. Loin d’être parfait, Sator tombe parfois dans l’attendu et sa fin peut même décevoir, mais en vue de son budget limité, le film jouit d’une qualité technique impressionnante, notamment durant sa première moitié reposant sur une horreur atmosphérique efficace. Sans trop en révéler davantage, nous vous invitons à découvrir Sator sur Shadowz, ainsi qu’en bonus, l’interview exclusive de son réalisateur, révélant la véritable histoire familiale derrière l’intrigue du film et les conditions de sa création qui en font une belle source d’inspiration pour les cinéastes amateur·ice·s souhaitant se consacrer à l’épouvante.Article écrit par Alexandre Carretero